Pourquoi s’intéresser au frelon asiatique ?
Le Frelon asiatique est arrivé dans le Sud-Ouest de la France au début des années 2000. En 20 ans il a déjà beaucoup fait parler de lui. Il aurait profité malgré lui de l’importation de poteries chinoises. Mais saviez-vous qu’il est aujourd’hui présent presque partout dans le territoire du Parc naturel régional du Haut-Jura ?
Parce que tout le monde est concerné !
Si l’on prend en considération le bien commun que représente la nature, alors tout un chacun doit se sentir concerné par la présence de cet hyménoptère. Le Frelon asiatique a, c’est le moins qu’on puisse dire, un appétit pantagruélique !
- Besoins en protéines d’un nid de frelon asiatique : 15 à 18 kg d’insectes divers dont 40 à 60% d’abeilles domestiques
- 10 abeilles = 1g
Faites le calcul !
En plus des protéines, le Frelon asiatique a besoin de sucre. Il va donc butiner le nectar des fleurs qu’il rencontre, entrant directement en concurrence avec les pollinisateurs locaux. C’est un affaiblissement supplémentaire pour eux. Il peut aussi se jeter sur des fruits, et causer des dégâts importants dans des vergers et des vignobles. En grand dévoreur d’abeilles, le Frelon asiatique inquiète tout particulièrement les apiculteurs.
Les frelons asiatiques sont présents dans l’ensemble de mes ruchers répartis sur plusieurs communes du Parc. Aujourd’hui, plus aucun d’entre eux n’est épargné par les attaques.
Jérôme Gagneur, apiculteur de “la ruche aux papilles” aux Bouchoux (39)
Autrement dit, il n’y a probablement plus une seule commune indemne de la présence du frelon asiatique dans le Jura, l’Ain et le Doubs, en dessous de 1000 m d’altitude. Et selon ses observations, l’année 2022 a été particulièrement propice au développement du frelon.
Ce dernier représente une pression supplémentaire et nouvelle pour les abeilles. Il s‘ajoute à un nombre de difficultés actuelles déjà important en apiculture.
Parce qu’il est intéressant de comprendre la biologie du Frelon asiatique
L’image que l’on a souvent du nid de Frelon asiatique, c’est une construction gigantesque faite de papier mâché, haut-perchée dans un arbre. C’est vrai, mais ce n’est pourtant qu’un logement d’été !
Dès le printemps (en avril dans le Jura), une femelle fondatrice qui a passé l’hiver dans le sol va créer un « nid primaire ». Ce nid est assez petit, et généralement très bien caché dans des buissons denses, un roncier, un tas de bois… C’est de là, en juin, que partiront les premières ouvrières pondues, pour construire le nid secondaire. Ce second nid est souvent inaccessible, en haut d’un arbre. C’est dans ce dernier que la colonie se développera complètement, et où la reine donnera naissance à des milliers de nouveaux frelons mais surtout à quelques dizaines, voire centaines, de nouvelles femelles fondatrices… Elles iront trouver refuge sous terre pour hiverner, puis recommenceront chacune de leur côté ce cycle de développement exponentiel !
Parce qu’on peut intervenir (enfin, pas toujours sans l’aide d’un spécialiste !)
La recherche sur l’espèce dispose de faible moyens mais des réseaux de bénévoles, composés d’apiculteurs et de scientifiques, s’organisent pour trouver des solutions.
Plusieurs scénarios de lutte contre les frelons sont à l’essai. Aujourd’hui, une méthode semble faire consensus et aurait le plus d’effet sur les populations de frelons asiatiques, compte tenu de leur biologie. C’est le piégeage massif et coordonné dans l’espace des femelles fondatrices au printemps. Des pièges sont encore à l’essai par des apiculteurs professionnel, pour mesurer leur efficacité. Le but est bien de capturer un maximum de femelles en sortie d’hivernage, mais de rester le plus sélectif possible pour ne pas capturer d’autres insectes, dont le Frelon européen, que l’on souhaite bien garder dans notre faune autochtone !
Le grand public n’est donc pas invité à piéger les frelons. En effet, les pièges ne sont pas sélectifs et peuvent capturer d’autres insectes. Les insectes subissent suffisamment de contrainte sans qu’on leur rajoute une menace supplémentaire.
Les nids d’été des frelons, s’ils sont découverts, peuvent – et doivent – bien-sûr être détruits par des entreprises spécialisées. Leur découverte reste néanmoins rare car ils sont généralement très haut et bien cachés par les feuilles des arbres.
Parce que sa présence est liée à notre mode de vie
L’IPBES, que l’on compare souvent au « GIEC de la biodiversité », nous apprend qu’une des principales atteintes à la biodiversité est la présence d’« espèces exotiques envahissantes ». Et le Frelon asiatique en fait évidemment partie. Le nombre de ces espèces invasives, largement répandues en France a augmenté de 76 % au cours des 35 dernières année. Elles sont arrivée en France par bateau porte-containers ou par avion, avec des marchandises par exemple.
Il peut s’agir de graines, comme celles de l’Ambroisie, originaire d’Amérique du Nord. Cette plante de la famille des armoises qui accompagne souvent les grandes cultures de tournesol possède un pollen très allergène. Citons également la Chalarose du frêne, arrivée en France dans les années 2000. Ce champignon venu d’Asie fait souffrir les frênes au point de les faire mourir en masse.
Le commerce international, le changement climatique et un affaiblissement général de la biodiversité sont des terreaux fertiles pour de nouvelles espèces, qui trouvent de bonnes conditions pour voyager et s’installer. Quelques années à peine après le Frelon asiatique, un nouveau venu asiatique a fait son apparition sur le territoire français : le Frelon oriental. Il a été observé pour la première fois en 2021 dans la région de Marseille. Et il pourrait bien faire parler de lui à son tour !